Pourquoi Bali n’est plus un paradis : sur-tourisme, pollution et désillusion

Pourquoi Bali n’est plus un paradis : sur-tourisme, pollution et désillusion

Publié le 13/12/2025 à 06h45

Bali continue de faire rêver des millions de voyageurs, mais derrière les images parfaites diffusées sur le web, la réalité est parfois tout autre. L’île des Dieux traverse aujourd’hui une phase de transformation rapide, qui déçoit un nombre croissant de visiteurs. Voici les principaux facteurs qui expliquent pourquoi Bali n’est plus, pour certains, la destination idyllique qu’elle a été.

Un sur-tourisme devenu incontrôlable

Bali est victime de son succès : sa beauté, son image paradisiaque et sa présence massive sur les réseaux sociaux attirent chaque année des millions de visiteurs. Mais cette fréquentation démesurée exerce une pression énorme sur l’île, qui n’a pas été conçue pour accueillir autant de monde.

Dans les zones les plus populaires comme Canggu, Seminyak, Kuta ou Ubud, les embouteillages sont devenus quotidiens, parfois dès le matin. Les routes étroites, initialement pensées pour la circulation locale, sont désormais saturées de scooters et de voitures de touristes. Parcourir quelques kilomètres peut facilement prendre 30 minutes à plus d’une heure, ce qui modifie totalement l’expérience de voyage.

Les sites emblématiques souffrent également de cette affluence. Des lieux autrefois paisibles tels que les temples, les cascades ou mes rizières sont désormais marqués par des files d’attente interminables, surtout pour prendre des photos “instagrammables”. Certains voyageurs parlent même de “parcs à selfies”, où la contemplation cède la place à la mise en scène.

Pollution et dégradation environnementale

La pollution est devenue l’un des problèmes les plus visibles à Bali, et elle surprend de nombreux voyageurs qui s’attendaient à découvrir une île préservée. La situation environnementale est le résultat d’un mélange de sur-tourisme, d’infrastructures limitées et d’un développement urbain rapide.

En saison des moussons, l’océan rejette sur les plages une quantité impressionnante de déchets plastiques, parfois en amas massifs. Ce phénomène est accentué par la mauvaise gestion locale des ordures et par les courants marins, transformant certaines plages touristiques en zones difficiles à nettoyer quotidiennement.

La gestion des eaux usées représente un autre défi majeur. Le système initial, conçu pour une population bien plus réduite, ne suit plus le rythme de l’expansion démographique et touristique. Cela entraîne parfois des rejets d’eaux usées dans les rivières ou dans la mer, contribuant à la pollution de l’environnement et affectant la qualité de l’eau.

Par ailleurs, la croissance rapide du tourisme a conduit à une urbanisation massive. Rizières, forêts et zones naturelles sont remplacées par des villas privées, des resorts ou des cafés construits sans toujours tenir compte de l'impact écologique.

Une hausse générale des prix

Bali, autrefois considérée comme une destination idéale pour les petits budgets, connaît aujourd’hui une inflation marquée liée à son immense popularité. La demande touristique ayant explosé, les prix ont suivi la même courbe.

Les hébergements, notamment les villas privées, ont vu leurs tarifs grimper fortement, parfois doublant en quelques années. Même les guesthouses traditionnelles, autrefois très abordables, affichent désormais des prix nettement plus élevés.

Les restaurants et cafés, souvent pensés pour une clientèle internationale, proposent des menus à des tarifs proches de ceux d’Europe ou d’Australie, ce qui contraste avec le coût de la vie locale. Les voyageurs qui espéraient manger à bas prix doivent souvent s’éloigner des zones touristiques pour retrouver des warungs authentiques et abordables.

Enfin, de nombreuses activités populaires (cours de yoga, retraites bien-être, massages, excursions en bateau, visites guidées) sont devenues de véritables produits premium.

La perte d’authenticité dans les zones touristiques

L’un des reproches les plus fréquents concernant Bali aujourd’hui est la transformation rapide de certaines régions autrefois traditionnelles en zones entièrement dédiées au tourisme international. Des quartiers comme Canggu, Seminyak ou même certaines parties d’Ubud ont vu leur visage changer radicalement en quelques années.

Là où l’on trouvait autrefois des villages paisibles, des maisons typiques balinaises et des rizières en terrasses à perte de vue, on voit désormais une succession de cafés minimalistes, restaurants branchés, boutiques de mode, studios de yoga “premium”, coworkings et bars tendance pensés pour correspondre aux attentes des visiteurs occidentaux.

Cette transformation crée une atmosphère plus mondialisée que locale, où l’on peut parfois avoir l’impression d’être dans un quartier international plutôt que sur une île indonésienne riche de traditions spirituelles et artisanales.

Sécurité routière et nuisances sonores

La circulation à Bali est souvent citée comme l’un des aspects les plus stressants de l’île, surtout dans les zones très touristiques. Les scooters dominent largement les routes, car ils permettent de se déplacer plus rapidement dans des rues étroites et souvent saturées.

La conduite parfois imprévisible, que ce soit de la part des locaux pressés ou des touristes novices contribue à une augmentation des accidents. Beaucoup de visiteurs louent un scooter sans avoir d’expérience, sans casque ou sans assurance, ce qui transforme parfois de simples déplacements en véritable source d’anxiété. À cela s’ajoutent des routes congestionnées, parfois mal entretenues, avec des passages étroits, des trous ou des zones peu éclairées la nuit.

Les nuisances sonores aggravent cette impression de désordre. Dans des régions comme Canggu, Uluwatu ou Seminyak, le vacarme des klaxons, des scooters, de la musique des bars et des boîtes de nuit peut durer jusqu’au petit matin. Les travaux constants (construction de villas, agrandissement de routes, nouveaux cafés ou hôtels) créent également un bruit continu, même dans des quartiers qui étaient autrefois calmes.

Cette réalité contraste fortement avec l’image zen, spirituelle et sereine qui fait la renommée de Bali.

Comportements irrespectueux de certains visiteurs

De plus en plus de touristes adoptent à Bali des comportements jugés irrespectueux : attitudes inadaptées dans les temples, tenues non appropriées, conduite sous influence, ou encore manque de considération pour les traditions locales. Ces dérives agacent les autorités et les habitants, poussant le gouvernement à instaurer des règles plus strictes pour protéger la culture et l’ordre public, des mesures parfois mal accueillies par les visiteurs.

Bali reste une île fascinante, riche en paysages sublimes, en culture et en spiritualité. Pourtant, le sur-tourisme, la hausse des prix, la pollution, la circulation chaotique et certains comportements irrespectueux ont progressivement transformé l’expérience du voyageur. Les zones touristiques les plus fréquentées ont perdu une partie de leur authenticité et de leur sérénité, contrastant avec l’image paradisiaque qui attire tant de visiteurs.

Malgré ces défis, Bali garde un charme indéniable, surtout pour ceux qui s’aventurent hors des circuits classiques : le Nord de l’île, l’Est ou les petites îles voisines permettent encore de retrouver l’âme, la beauté naturelle et la tranquillité qui ont fait sa réputation.

Photo de Arnaud Gerard

Auteur : Arnaud Gérard

Ancien responsable régional du Grand-Ouest chez Europ Assistance, il a créé Assur-Travel avec Philippe Munier en 2004.

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